Depuis plus de 72 heures l’Orissa, un Etat de l’est de l’Inde est le théâtre de violences antichrétiennes. A en croire le journal Le Monde, une dizaine de personnes a été tué, et plusieurs dizaines de bâtiments, églises, écoles, centres de santé, ont été incendiés sous les yeux apparemment impassibles des forces anti-émeutes fédérales, paraît-il dépêchées sur place.
Cette flambée de violence, qui n’est ni la première, ni la dernière dans cette région où les chrétiens ne représentent qu’une petite minorité de la population (2,3%) fait suite à l’assassinat d’un religieux hindou, imputé par la police indienne aux Maoïstes. Cependant, les chrétiens, boucs émissaires faciles et traditionnels dans cette région du monde, ont rapidement été pris pour cible par une population assoiffée de vengeance. Comme le souligne Andrea Riccardi, président de la communauté Sant’Egidio, cité par la revue Courrier international dans un article remarquable, « les chrétiens sont depuis longtemps dans le collimateur des fondamentalistes hindous » qui contestent l’action sociale et caritative menée en Inde par les missionnaires, et redoutent l’attrait exercé sur les basses castes et les animistes par une religion égalitaire, à l’exact opposé du système de castes propre à l’Hindouisme.
Une jeune italienne de 20 ans, responsable d’un orphelinat géré par des missionnaires a été tuée au cours de ces persécutions. En conséquence, le ministère italien des Affaires étrangères a convoqué l’ambassadeur de l’Union indienne à Rome pour lui faire part de la nécessité de procéder à une « action décisive » pour que cessent ces violences contre les chrétiens dans son pays.
Le gouvernement français, qui assure, faut-il le rappeler, la Présidence de l’Union européenne, est resté résolument silencieux. Le ministère des Affaires étrangères pourtant dirigé par un apôtre du devoir d’ingérence n’a pas daigné produire ne serait-ce qu’un communiqué pour appeler à l’arrêt de ces persécutions. Pire encore, l’organe officiel du gouvernement français, le journal Le Figaro, ose titrer le seul article qu’il consacre à ce sujet : Flambée de violence entre hindous et chrétiens en Inde, renvoyant ainsi lâchement dos à dos les deux communautés au mépris de toute vraisemblance et surtout de la réalité pourtant bien connue de la situation (1). Cet article insiste par ailleurs sur la dimension « sociale et politique » du conflit, refusant de considérer que se trouve ici à l’œuvre une mentalité persécutrice spécifiquement antichrétienne.
On voit qu’à la veille de la visite du Pape en France, le chemin est encore long avant que la France ne regagne son rang de fille aînée de l’Eglise, quoiqu’en pensent certains défenseurs de notre chère laïcité prétendument menacée par le beau discours présidentiel du Latran, apparemment resté lettre morte.
(1) Ah pardon ! Je constate en terminant ce texte que Le Figaro a consacré un autre article à ces persécutions, en fait une brève reprise de l’AFP intitulée : Inde/Tensions ethniques : deux morts. Sans commentaire.